Réformes sous Akhenaton
Au passage de l’an III à l’an IV de son règne le pharaon célèbre son jubilé alors que la tradition voulait que le Heb Sed (ou fête jubilaire) soit célébrée après trente années de règne. Cette célébration semble avoir pour seul but de proclamer le caractère divin de pharaon mais les textes laissent plutôt entendre que c’est le disque solaire Aton qui est célébré. C’est donc à cette époque que le jeune roi décida de vénérer le disque-Aton. Puis le pharaon prit les fonctions et le titre de grand prêtre d’Aton. |
Pour la première fois un pharaon s’oppose au
puissant clergé d’Amon. Pour bien opérer ce changement fondamental
dans la société égyptienne le couple royal formé par Akhenaton et Néfertiti doit
quitter Thèbes. En effet ce dernier est un important centre religieux qui regroupe les adorateurs et
les serviteurs d’Amon. Il choisit alors de bâtir une nouvelle
capitale consacrée à Aton qu’il baptisa Akhetaton, qui signifie « l’horizon d’Aton ».
En l’an VII de son règne, il s’y installe avec sa femme, ses filles et à
sa suite. Les hauts fonctionnaires, artisans
et ouvriers s’y installent aussi et adoptent ,à priori, le culte d’Aton. Avec le
soutien de sa femme Néfertiti le pharaon impose Aton comme le dieu
unique et instaure le monothéisme. Cette réforme religieuse brutale est unique dans l’histoire de cette civilisation tant
son conservatrice est présent.
La naissance d’un nouvel art dit « amarnien » prolonge la
révolution des dogmes ancestraux du peuple égyptien. Il se
caractérise par une nouvelle expression des personnages : plus
vivante, plus figurative, et surtout plus humaine et plus
sensuelle. Cela tranche avec l’expression très solennelle de
l’art traditionnel. Cet art revêt des tendances expressionnistes
qui laissent deviner des sentiments d’affection (comme sur le
groupe en calcaire peint du pharaon et de Néfertiti, où ces deux
derniers se
tiennent par la main). Cette scène aurait été impossible dans l’art égyptien
traditionnel. |
Désormais, les sculpteurs et les peintres osent représenter le pharaon et sa famille dans des scènes de la vie quotidienne ce qui était jusqu’alors inconcevable. L’art « amarnien » se traduit donc par une plus grande liberté dans la représentation des scènes privées et officielles, loin des schémas traditionnels très rigides. Les artistes sont donc libérés des conventions traditionnelles et représentent la famille royale dans son intimité. La représentation de la famille royale reste la partie la plus intrigante de cet art nouveau. En effet, à partir de l’an IV, on voit la figure du roi s’allonger, les joues se creuser, les lèvres devenir plus pulpeuses et charnues. Quant au menton il est plus pointu et en galoche. | |
Toutes ces caractéristiques physiques se retrouvent chez les
autres membres de la famille royale. Les représentations du pharaon
apparaissent comme provocantes et audacieuses dans la mesure où elles
sont très loin des canons de beauté égyptienne (et encore plus de ce qu’imposera la beauté grecque trois ou
cinq siècles plus tard !) : ses épaules sont décharnées, son
ventre est ballonné. |
Dès qu’on exhuma et
exposa les statues d’Akhenaton au musée du Caire, deux
hypothèses furent formuler afin de tenter d’expliquer leur aspect : certains estimèrent
qu’il s’agissait d’une véritable exagération, une caricature, tandis que
les autres pensèrent qu’elles reflétaient le physique réel du pharaon.
Dès lors, une question se pose : quelle serait la
cause de l’inhabituelle morphologie d’Akhenaton ? S’agirait-il d’une
maladie ?
L’analyse des anomalies physionomiques présentées
par Akhenaton laissa tout d’abord penser au syndrome de Klinefelter.
Cependant, celui-ci s’accompagne d’une stérilité. Or, on sait
qu’Akhenaton eut six filles avec l’épouse royale Néfertiti. On ne peut
pas retenir cette hypothèse.
L’étude des autres syndromes entraînant les mêmes
anomalies anatomiques suggère que le pharaon aurait pu être atteint du
syndrome de Barraquer-Simons qui se caractérise par une lipodystrophie
progressive (anomalie dans la répartition des masses graisseuses). Ce
qui entraine une
fonte du tissu adipeux sous cutané du visage, du cou, des épaules, et du
thorax ainsi qu'une hypertrophie adipeuse des parties inférieures du corps
(sous le nombril) telles que les hanches, les fesses et les cuisses.
Cette maladie débute à l’adolescence ou dans l’enfance et s’aggrave avec
l’âge, ce qui concorde avec les statues retrouvées du souverain. En
effet, sur les monuments les plus anciens, la silhouette du jeune prince
n’est guère différente de celle des autres princes l’ayant précédé.
Toutefois, l’hypothèse d’un nouveau style
artistique visant à souligner la singularité divine du pharaon et de la
famille royale n’est pas pour autant à exclure. En effet, il ne faut pas
oublier que l’art « amarnien » était un art de cour qui devait respecter
les normes imposées par le pharaon visant à exprimer la hiérarchie
sociale. On est amenés à penser comme certains égyptologues que les
artistes ne faisaient que suivre les exigences d’Akhenaton, qui voulait
que le lien qui l’unissait au dieu unique Aton soit mis en évidence.
Seule l’analyse de la momie d’Akhenaton pourrait
apporter les réponses à toutes les questions posées.
Le mystère reste entier …